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Malo Kervern : orpailleur historien
Un article de Sébastien Joncquez publié dans Le Progrès de Cornouaille - Le courrier du Léon en 2014.
Or, étain, plomb, cuivre… L’homme aujourd’hui âgé de 39 ans est prolixe lorsque vous commencez à discuter avec lui de sa passion. « La Bretagne a une histoire incroyablement riche. Elle faisait partie de ce que l’on appelle la communauté du bronze atlantique », assure-t-il tout en partant à la recherche d’un livre prouvant ses dires. Il tourne les pages, s’arrête sur un passage, une illustration. « L’étain en Bretagne, hier, c’était le pétrole d’Arabie Saoudite aujourd’hui », ajoute-t-il, osant le parallèle.
Sa passion pour la géologie appliquée remonte à son enfance. Il a même passé deux saisons dans les Monts-d’Arrée et du côté de Trégourez à chercher des minéraux, et notamment le plus précieux d’entre tous. « C’était la liberté, je m’en fichais. Je ne cherche pas à faire de l’or. C’est aussi éloigné pour moi que de travailler comme trader », sourit-il. Non, il le jure, s’il cherche des filons à longueur de temps, c’est d’abord et avant tout pour la recherche patrimoniale. Il collabore d’ailleurs avec le CNRS et, plus précisément, avec Cécile Le Carlier, sa référente au sein du célèbre Centre national de la recherche scientifique.
Marin puis maçon
L’homme a toujours aimé l’aventure. Déjà, alors qu’il a 20 ans, il a envie de grand air. « J’ai pas mal bourlingué à l’époque. » Musicien, il sillonne les contrées britanniques et irlandaises. Pendant un an et demi. En rentrant, il tombe sur une annonce de Pôle emploi pour exercer le métier de marin-pêcheur. Il s’éclate que ce soit au large de Sein où il relève des casiers ou au plus long court.
« Ma femme m’a demandé d’arrêter car elle avait la trouille. Nous, en mer, on a l’habitude des avaries. Cela arrive. Mais plusieurs accidents l’ont sérieusement inquiétée. » « Contre l’avis général », il change de direction professionnelle en se lançant dans la… maçonnerie.
Détours professionnels
Il parvient à intégrer l’Afpa – organisme de formation professionnelle qualifiante pour adultes – et en sort avec une truelle d’or. « J’ai commencé directement sur le chantier de la cathédrale. » De quoi raviver sa passion de la géologie, du patrimoine, des belles pierres, de l’histoire du Finistère. Après quelques années, il est pourtant contraint de stopper.
« J’ai été arrêté en urgence. J’avais trop forcé. je n’avais jamais vraiment fait attention à ma santé. » Hospitalisé, on lui trouve « six maladies à chaque bras », dit-il sérieusement. Il est déclaré travailleur Cotorep. Mais Malo Kervern ne se voyait pas « finir à la photocopieuse », seule proposition qu’on lui aurait faite. « Du coup, je suis retourné à l’orpaillage. »
Et il a conçu un spectacle où il explique les techniques de nos ancêtres à l’Âge de bronze jusqu’au Moyen-Âge. Quand il en parle, son œil devient alors particulièrement vif. Il prend un bocal contenant du sable de plus ou moins grande densité, il sort de sa malle un morceau de roche sur lequel il a découvert de l’étain, il s’emballe à l’évocation d’une incroyable découverte… « On se croit alors en Guyane, au milieu de nulle part. C’est le grand frisson. » Un frisson qu’il ne veut pas cupide, contrairement à d’autres orpailleurs qui arpentent les rivières et cours d’eau finistériens à la recherche du grand gisement.
« Ce qui m’intéresse, c’est mon patrimoine, celui des Finistériens. Et je cherche à créer quelque chose qui permet aux Bretons de se réapproprier leur histoire. » Ce qui passe par un spectacle de deux heures où le public pourra découvrir, à partir d’un tas de sable, comment on fabriquait des outils, des objets de décoration, voire des armes.
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